La réforme de l’impôt foncier, la fin des terrains vagues (Baulücken) ?
Le dernier discours sur l’état de la nation a amorcé la réforme de l’impôt foncier, attendue depuis de nombreuses années, le projet devrait prendre place dès la fin de l’année 2022.
Pourquoi cette réforme est stratégique ?
Dans les enquêtes d’opinion, la question du logement est récurrente. Les prix de l’immobilier en 2021 ont battu des records, et il est de plus en plus difficile d’acquérir un bien au Luxembourg. Bien que la remontée des taux d’intérêts, le ralentissement de la croissance devraient quelque peu freiner l’inflation, les prix affichés pour les terrains demeurent – très – élevés.
Selon l’observatoire de l’habitat, ainsi que les études du ministère du logement, la première solution ne se trouverait pas dans l’extension des zones habitables (c’est-à-dire la création de nouvelles zones en étendant le PAG), mais plutôt dans l’utilisation des zones existantes, trop peu aménagées. Le ministère qualifie ces zones de ‘mobilisables rapidement’.
En effet, environ 3700 hectares de zones foncières seraient exploitables, zones déjà assimilées en habitable ou mixte. Cela pourrait constituer jusqu’à 140 000 logements, de quoi loger plus de 300 000 habitants supplémentaires.
L’Etat ainsi que les communes ont débuté l’aménagement des zones dites ‘Baulücken’ (terrains vagues, non aménagés) dès 2016, mais ces zones constituent des propriétés étatiques ou communales, et non des propriétés privées.
Ce sont ces dernières que vise la réforme de l’impôt foncier. Des propriétaires personnes physiques, qui détiennent des terrains vagues, transmis souvent par successions, conservés par les familles du fait d’impôts fonciers peu élevés ainsi qu’un droit de succession absent en ligne directe. Ce n’est même pas, à proprement parler, de la spéculation (qui sous l’empire du droit fiscal signifie une cession moins de 2 ans après l’acquisition), mais plutôt de la conservation afin d’assurer aux descendants un pied à terre ou le fruit de rentes. 3500 personnes, soit environ 0,5% de la population, détiennent à titre privé ces zones foncières vagues.
L’objectif est donc d’aménager ces terrains inutilisés, en favorisant les propriétaires à rendre ces propriétés habitables, autrement dit – à usage d’habitation. Cela ne signifie donc pas obligatoirement la vente du terrain, mais au moins son aménagement, par exemple en accord avec un promoteur, la liberté contractuelle permettant ici de nombreuses options.
L’impôt foncier n’est pas le seul levier à considérer.
Il faut tout de même remarquer que l’impôt foncier n’est pas le seul levier à considérer, on peut aisément émettre une critique sur l’imposition des plus-values immobilières, qui certes dispose d’abattements, d’un demi-taux à partir d’une durée de détention de 2 ans, mais n’est en aucun cas plafonnée comme c’est le cas en France par exemple où la fiscalité est pourtant réputée élevée. A partir de 22 ans de détention (en 2022), la plus-value y est totalement exonérée. Les propriétaires qui détiennent ces biens et terrains au Luxembourg depuis de nombreuses années ne sont ainsi pas incités à vendre. Il faudra ainsi que l’impôt foncier correspondant à ces terrains soit vraiment dissuasif pour que ces propriétaires décident de vendre. Le gouvernement assure que le PAG n’a pas à être modifié, pourtant, augmenter le nombre d’étages (de 2 étages pleins à 3 étages pleins par exemple) reste une solution efficace, non envisagée. Certaines zones habitables empêchent la construction d’habitation jumelée, ou encore exigent des maisons unifamiliales, cela est complètement disproportionné contenu de la crise du logement.
Quoi qu’il en soit, la situation s’améliore progressivement, puisque en 2016, 82% des terrains étaient détenus par des personnes physiques, alors qu’aujourd’hui, ce chiffre est plutôt de l’ordre des 60%. Les 40% restants sont détenus par des personnes morales (souvent des promoteurs, ce qui est donc positif), et le reste par les collectivités publiques et l’Etat (selon l’observatoire de l’habitat).
L’impôt foncier, qui sanctionnera la détention d’un terrain – sans usage d’habitation – (dans une zone habitable ou mixte bien sûr) permettra ainsi éventuellement de débloquer progressivement de la place pour construire de nouveaux logements. Il est pressenti comme étant progressif, c’est-à-dire plus élevé à mesure que les années de détention s’accumulent. Ne reste plus qu’à en voir l’efficacité.
Van Maurits Immobilière.